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Soulagement, mais Fleur s’en veut. Il s’en veut de ce sentiment qui l’envahit tout entier alors qu’il voit Kiya’na toucher terre, quand bien même ses troubles ne sont-ils pas finis. Honteux d’être soulagé alors qu’ici c’est l’enfer sur terre, soulagé, mais toujours en danger, soulagé, mais pour combien de temps? Soulagé, mais Milo a attiré l’ire de la bête -mais Milo n’est qu’un inconnu lui, Fleur n’a-t-il pas le droit de se sentir ainsi?- soulagée, mais Oyaris saigne et vient tacher la neige déjà noir de suie et de fumée. Soulagé quand ses propres pokémons font tout le travail, soulagé quand tout Hoarford souffrira de la perte de sa serre adorée pendant des mois à venir. Oui, au fond, Fleur se rend bien compte qu’il n’a pas le droit de l’être, pas encore, et il se sent honteux, en plus de soulagé. Mais il se dit que vaut mieux honteux que déchiré par la perte de Kiya’na – quand bien même elle lui en voudrait de se sentir ainsi, là maintenant. Il s’est relevé du sol parce qu’il y a des éclats de verre qui fusent partout, mais dans quel but? Kiya’na la brave (trop brave) a sautée sur la bête, elle – Milo a attiré son attention pour le détourner de la serre, et Oyaris a pris cher pour Kiya’na, et Rio, lui, avait ramené un de ses pokémons à la conscience juste parce qu’il fallait continuer de se battre, mais Fleur, lui, pendant ce temps-là? Certes, ses pokémons s’acharnaient contre le feu et contre l’Obscur, mais Fleur, lui? Il n’y a pas cinq secondes, il était assis le cul dans la neige, et puis pour le moment il a chaud parce que le feu brûle derrière lui, si près de lui – mais chaque pas qui le soutire aux flammes qui voudraient lécher sa peau le fait grelotter violemment, coup de vent qui vient nourrir le feu et refroidir sa peau à nue ((son visage, ses mains)), parce que travailler dans la serre c’est être en salopette et vêtements de tous les jours, pas de porter une grosse doudoune et pour une fois, heureusement que Fleur a toujours froid, parce qu’au moins il portait un gros chandail de laine même pour travailler à l’intérieur. Si le vent passe dans les trous des mailles, tant pis – s'il tremble ce n'est pas que de froid, parce qu’après le soulagement, l’horreur de la situation ne fait que le frapper plus fort.

Mais il continue d’avancer – vers toi, Oyaris, toi qui a attiré son attention ((Eh, tu peux m’aider à l’entourer correctement ?)), le ton de voix qui ne lui permettait pas de dire non. La colère n’était pas dirigée vers lui, mais disons qu’elle lui donnait des ailes, et puis, s’occuper de toi, c’était déjà d’occuper son esprit à quelque chose de productif et Arcéus seul savait combien il en avait besoin. Soulagé, encore, qu’on prenne la décision de quoi faire pour lui, parce que c’était difficile de faire des choix tous les jours de sa vie et maintenant n’y était pas exception. Sauf qu’il n’avait rien sur lui – pas ses baumes et pas ses plantes, pas son sac à dos dans lequel il avait un nécessaire de premiers soins. « J’suis pas médecin » oui, chiche Fleur, comme si c’était pas évident, ça; « M-mais j’ai ma formation » formation de quoi? Il laisse le doute planer, mais vu les circonstances, c’est plutôt évident. « J’vais te le faire ton garrot, mais je t’apprends rien, faut pas le garder trop longtemps. Pour le sang- » il regarde le Sancoki dont la tête point de sous son haut. « Déjà, Gloop, tu peux arroser ça? Et si tu me permets- certains Sancoki ont- » et puis il s’arrête, brusquement, le corps tremblant mais les doigts précis alors qu’il enserre le tissu autour de ton bras, un poil plus haut que là où toi tu essayais de l’enserrer, juste parce que la courbe du biceps s’y arrêtait et que le lambeau de manche s’y callerait mieux, sans bouger ensuite. Il s’est arrêté pendant que le Sancoki tire un jet d’eau sur ton bras parce que - « Pas le temps d’expliquer, serre bien les dents » et puis il vient soulever le Sancoki, un son un peu de succion mouillé alors que la limace se détache de sa peau. Le saviez-vous? Certains Sancoki ont une capacité toute spéciale qui rend leur « bave » ((enfin, la sécrétion de leur corps)) antiseptique. Et il s’adonne que le Sancoki de Fleur avait cette capacité…

Pas besoin de vous faire un dessin sur le laps mental que Fleur vient de faire. Le voilà qui passe sa main sous le corps de Gloop, ramasse une bonne poignée de ce mucus terrible, et puis qui vient le splatter sur ta plaie.

Dire que ça pique et ça brûle, c’est probablement l’understatement du siècle. Et puis il repose son pokémon sur son épaule, le temps de regarder de tout bord tout côté, seulement pour se rendre compte que son Manternel était encoure ((et toujours)) à ses côtés, attendant poliment qu’il lui donne son ordre. « Colori, tu peux me ficeler tout ça? » dit Fleur avec un certain empressement, lui qui tenait toujours fermement ton bras comme s’il avait peur que tu t’enfuies au premier moment pour aller tabasser l’obscur de tes mains nues. Tu avais l’air du genre de type qui le ferait ((cordialement)). En deux temps trois mouvements, Colori produit une soie qu’il vient entourer ton bras – la même que les Manternel utilisent pour venir habiller les petits Larveyette, une soie souple, légère et résistante qui saura tenir jusqu’à ce que tu trouves un hôpital. Et puis Fleur te relâche sans plus de mot, tournant son attention vers le colosse volant, tout comme tu devais le faire aussi. Et puis il se dit – est-ce que Kiya’na est blessée, elle aussi? Mais il n’est pas le temps de s’en préoccuper, parce que les plaies et les blessures ne feraient qu’abonder tant que l’obscur était en vue. Et sa prochaine victime serait sûrement Milo…

« Colori » dit-il fermement, son pokémon se plaçant en position dynamique; « Canon Graine » certes, ce n’était pas l’attaque qui aurait le plus d’effet sur le colosse, mais Fleur savait deux choses; que Colori était fort, et qu’il était bien entrainé. Il avait beau ne pas avoir le bon type – quand bien même, les coques de graines s’envolent vers l’oiseau maudit pour s’écraser contre son corps. Sentait-il même les attaques qu’on envoyait vers lui? Il n’était, en apparence, que fureur et soif de sang, alors Fleur en doutait. Et à nouveau, ses mains sont vides, et seul le bourdonnement de ses oreilles vient le convaincre qu’il n'est pas dans un rêve, lui qui sent son corps comme flotter. Mais chaque respiration lui provoque une douleur sans nom – et les rêves ne sont pas si souffrants, n'est-ce pas? Pas de cette manière, en tout cas.