Menu

In these promises broken deep below, each word gets lost in the echo

Il y a trois groupes de personnes, sur terre. Il y a de ceux qui travaillent honnêtement, gagnent leur pain à la sueur de leur front, n'ont jamais enfreint de lois. Il y a ceux que la vie a brisé, qui se sont brisés, et dans la confiance qui s'était perdue, et dans l'espoir écrasée, se ruinent pour mieux se détruire. Et puis, il y a Zamas.

Parce que tous les mots ne seront jamais assez pour dévoiler son cœur.
Parce que tous les mots ne seront jamais assez pour changer ses mœurs.

Le feu avait déjà pris beaucoup de sa vie, de son monde, alors qu'il s'était réveillé - s'était fait réveiller plutôt - en panique à cause de l'alarme qui criait depuis un bon moment déjà. Endormi devant sa série préférée, encore les écouteurs aux oreilles, jeune Zamas avait été réveillé par Oyaris qui l'avait tiré de son lit, lui et sa tête encore dans les nuages. Un rêve. Ça ne pouvait être qu'un rêve qu'il s'était dit, mais même les rêves les plus réalistes ne laissaient pas sentir le chaud des flammes à ce point. De son point de vue encore troublé, il aperçut Vlinder en face d'eux. Oyaris avait fait demi-tour. Pour lui, son frère avait bravé les flammes, alors qu'il aurait pu fuir pour sa peau. Il l'avait sauvé.

"Mais notre jeu !"

C'était tout ce qu'il trouva à dire, sur le coup. Il n'avait pas remarqué que leurs parents n'étaient toujours pas sortis. Il n'avait pas remarqué l'inquiétude sur le visage d'Oyaris.

"On en achètera un autre."

Il regardait la fumée monter dans le ciel, et le ciel se remplir de cette même fumée. Étouffante. Le ciel rouge. Un spectacle terrifiant. Pour le jeune garçon, c'était comme voir tous ses souvenirs le quitter. La maison brûlait à une telle vitesse que lorsque les secours sont arrivés, elle était presque déjà entièrement détruite. Zamas regardait son grand frère parler avec les hommes - ou les femmes - arrivés pour les aider. Les nouvelles étaient tombées. Deux nouvelles étoiles sont nées, ce soir-là, à Illumis.

********************

Les murs blancs de l’hôpital en donnaient la nausée au pauvre garçon qui cherchait juste désespérément ses parents. La tête de gauche à droite, le cou qui s'allongeait, il tentait d’entendre les discussions des infirmières alors qu’il se faisait traîner de force dans une chambre où il n’avait aucun goût d’aller. Pas sans ses parents. “Oyaris, j’ai peur…” Ses parents ne viendront pas. “Ils sont morts, c’est ça ?” La petite voix de Vlinder résonne dans la chambre bien trop petite, bien trop étouffante. Non. Impossible. Il ne pouvait pas les avoir perdus. Zamas refusait de le croire. Le feu.. Il avait déjà assez fait mal à Oyaris, il ne pouvait pas prendre ses parents en plus. Le feu, c’était son pire ennemi. Zamas le détestait. Il voulait juste retourner chez lui, être dans ses affaires. Il n’avait plus de chez lui. Il n’y avait que son frère et sa jumelle, et ces quatres murs carrés blancs, avec quelques taches dessus, et ce petit écran qui n’était définitivement pas le dernier cri en matière de modèle.
Mais il y avait un reportage qui passait à la télévision, en ce moment, et Zamas n’avait rien à faire alors autant bien le regarder.

“... battement d’aile d’un papillon, qui peut provoquer une tornade ailleurs quelque part. On parle d’effet papillon. Il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s’amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux. Cette notion ne concerne plus seulement la météo, mais s’applique également aux sciences humaines, à l’environnement. Par exemple…”

L’effet… papillon ? Comment un tout petit papillon inoffensif pourrait-il provoquer d’aussi gros changements ? Si c’était vraiment le cas… alors leurs ailes peuvent aussi provoquer des incendies, des meurtres ? Mais oui, ça fait du sens ! Sinon, il venait d’où, le feu ? Parce qu’il est arrivé de nulle part. Horrifié, le garçon devait absolument prévenir le personnel infirmier. Si ça se trouve, ils étaient toujours en danger en ce moment même. Si les papillons voulaient leur peau en ce moment, comment s’en sauver ? Ils étaient si nombreux, et eux n’étaient que trois. Zamas bondit d’un coup du lit pour aller voir celle qui les avait admis ici, mais Oyaris attrapa rapidement son bras.

“Non.”

“Mais Oyaaaaa ! Les papillons sont dangereux !!”

Il devait protéger Vlinder. Il se le devait. Il devait lui redonner le sourire. Pourquoi ? Parce que son sourire était la chose la plus précieuse qu’il avait.

Mais son grand frère avait autre chose en tête. Fuir. Partir d’ici. Trois gamins, parcourant les ruelles. Oyaris était jeune, quatorze ans à peine, et il se devait de les protéger. Le monde est cruel, et Zamas n’avait pas fini de l’apprendre. “Attends ici.” Autant il pouvait contrarier Oyaris par moment, autant il n’avait aucune envie de le déplaire en ce moment. Ils se devaient de rester unis. Zamas regardait par le cadre de porte, un peu stressé mais confiant. Oyaris, il était rapide et agile, il se faufilait entre les couloirs et les infirmières et miraculeusement, personne ne le remarquait. Était-il invisible ? Ils l'étaient déjà. Il était revenu, finalement, avec un vestige de ce que Zamas pensait être disparu, le seul héritage de la famille : le pendentif de leur mère. Zamas le chérissait. Et ses yeux, pendant un moment, ils s'étaient illuminés comme les étoiles.

Mais le temps n'était pas aux sentiments. Ils devaient fuir. Sortir de ce satané hôpital qui n'en avait rien à foutre d'eux. Ils voulaient juste les refouler le plus vite possible aux services sociaux et ça, ils ne pouvaient pas se le permettre. Alors il fallait observer, silencieusement, observer et prendre en notes les aller-retour des infirmières. Il y en avait beaucoup. Quand même, Zamas aurait bien voulu que l'une d'entre elles leur demande comment ça allait.

********************

Ils avaient réussi. Ils étaient sortis. Et autant il aurait dû se sentir soulagé, le petit Zamas se sentait tout autre. Confus, perdu dans ses pensées, mais il devait courir, parce qu'il y avait des yeux partout. Oya et Vlind, ils devaient changer d'apparence. Ils se démarquent trop. Zamas, lui, pouvait juste mettre son capuchon par-dessus sa tête, et c'est comme s'il n'avait jamais existé.

"Oya.. on va faire comment ?"

Comment vont-ils survivre ? Ils n'ont pas de boulot, d'endroit où dormir, et les deux jumeaux n'étaient certainement pas en mesure de subvenir à leurs besoins par eux-même. Oya, lui, devait.

Le monde était si pur, autrefois, pour Zamas. Pas de misère, pas de famine, pas de problème. Maintenant qu'il était à la rue, maintenant qu'il avait tout perdu - sauf son pendentif - Zamas voyait qu'au fond, la vie était loin d'être ce qu'il pensait. Tout comme lui, tout comme eux, des dizaines de gens arpentaient les rues à la recherche d'un peu de monnaie pour un croissant, ou du linge à se mettre sur le dos. Il était trop tard pour changer d'avis, maintenant. Ce n'était pas facile à tous les jours. Très vite, le jeune avait pris la décision d'aider son frère du mieux qu'il pouvait, dans l'espoir que Vlinder ne soit jamais perverti.

Alors il avait commencé. À voler, à arracher sans redonner de la main des faibles, de ceux qui de toute façon, allaient mourir. Mais eux, ils devaient survivre. Ils avaient encore une vie devant eux, et ils devaient trouver un moyen d'empêcher la fin du monde. Dans son sweat rempli de sueur et de taches, son innocence avait été enlevée. C'était de leur faute.

Et puis, un jour, Oya avait dit qu'ils devaient partir. C'était trop dangereux. Ils avaient fait le tour de Kalos, ne restant pas une nuit au même endroit. Le moins possible. Bouger, toujours bouger. Pour les semer, pour les fuir, il fallait bouger. Zamas le savait aussi, ils les regardaient. La dernière ville que Zamas avait vu de sa région de naissance, ce fut Port Tempères.

********************

So one last lie I can see through

Ça faisait combien de temps, maintenant ? Zamas l'ignorait. Il avait grandi, Vlinder et Oyaris aussi. Leur vie, maintenant, c'était bateaux et trains, hôtels lorsqu'ils pouvaient se le permettre. Ils avaient fuit, ils continuaient de fuire, et ce que Zamas ignorait, c'est que la fuite ne se terminait jamais réellement.

"Reviens ici, gamin de merde !"

Vite.
Courir.

Zamas était plus vieux, il se devait encore plus d'aider Oyaris. Oya faisait tout pour eux, après tout. Dans sa course déchaînée pour échapper au marchand en colère, il tomba sur un homme, dans un coin de ruelle. La vue n'était pas belle. Enfin, il en avait vu, des choses affreuses, mais là, c'était tout autre. Le sang qui coulait de sa plaie infectée, les yeux vitreux, le pauvre homme peinait à survivre. Zamas a dû rester là un moment, figé, avant de se faire interpeller.

"De… l'eau…"

De l'eau ? Mais ils avaient besoin de leur eau ! C'était vital, l'eau. En plus, Zamas revenait tout juste de faire les courses, s'il revenait sans le liquide si précieux à la vie, que penserait Oya ? Non, il ne pouvait pas. Ils devaient survivre. Zamas continua son chemin.

"Oya, on doit partir ! On m'a vu !"

Et encore. Et encore. Et encore.

Fuir, c'était leur vie, maintenant. Le deuil de ses parents était fait, mais il avait surtout été forcé. Forcé de grandir, forcé de fouler la terre sans regarder derrière. D'ignorer les ampoules qui se formaient sous ses pieds. D'ignorer les pauvres âmes dans le besoin.

Zamas ne compte plus les jours. Mais parfois, de temps en temps, on le surprend. Une année de plus, comme on dit. Son anniversaire. L'anniversaire de Vlinder. À quoi bon s'en rappeler ? Mais au fond, tout au fond de lui, il tenait à s'en rappeler. Parce que s'il ne se rappelle pas de ses bases, de ses racines, ça ne sera pas long avant qu'il se perde à la folie.

********************

Mother, looking at me.
Tell me, what do you see ?
Yes, I’ve lost my mind

Daddy, looking at me.
Will I ever be free ?
Have I crossed the line ?

La fin du monde approche, et ils doivent se préparer. Zamas a une idée. Un bunker ! C'est l'idée parfaite, au fond. Mais il doit se préparer. Il doit penser. Faire des plans. Vlinder, elle est bonne pour faire des plans. Et lui, il les retouche. Et Oya fournit les matériaux. S'ils ont un bunker, ils seront sans danger. Et ils pourront inviter des gens qui voudront bien les aider. Oui, c'était un plan parfait. Mais un plan parfait prend du temps à se peaufiner. Des années. Zamas observe. Il est fatigué. Il doit se reposer. Mais il ne peut pas. Alors il regarde les étoiles. Les étoiles… on dirait qu'elles veulent lui parler.

"Bonsoir, vous autres. Comment ça va ? Moi, hum… on va dire que y'a eu des jours meilleurs, mais y'a aussi eu des pires. Donc bon, pas si mal en fait. Vlinder dort. Elle est jolie quand elle dort. Elle est tout le temps jolie."

Et son odeur. Zamas ne pourrait pas se passer de son odeur. De son toucher.

Une nouvelle vie. C'était ce que Lentis était supposé être. Un nouveau départ. Ils sont majeurs maintenant. Alors ils ont élus domicile à Adamantia, l'île la plus froide, mais surtout la plus reculée. Oyaris avait fait faire des passeports, de nouvelles identités. Ils n'étaient plus Atkins, maintenant, ils étaient Allens. Majeurs, libérés, mais suivis. Il le savait. Allens, c'était surtout la sécurité. Mais son passé, il le garde, loin, profond. Parce qu'il ne peut pas parler de son enfance, et il n'a pas grand chose à raconter sinon.

Parce qu'il a la chance de dire qu'il a traversé toutes les régions, mais la malchance de ne pas avoir pu les visiter. A vu tellement de belles choses, mais n'a jamais pu s'arrêter pour les contempler.

Résumé ici: