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Lei avait dit oui. Il avait accepté que tu propose à son père de travailler au restaurant avec lui. Trois jours, avait-il dit. Tu considérais que c'était une victoire. Petit sourire, parce que tu avais gagné. Tu avais réussi à le convaincre. Et c'était important pour toi d'enlever le plus possible de pression sur ses épaules. Même si, ultimement, tu aurais voulu plus… Trois jours, c'était plus que zéro, et il faudrait t'en contenter. Il acceptait que tu les aide, c'était déjà ça, non ?

“Promis, je ne me laisserai pas tomber malade.”

Oh, comme tu aimais ces moments de tranquillité, ces moments privés avec Lei. De plus en plus, tu pouvais profiter un peu de cette intimité, Raph et Lena étant souvent autre part, et bien souvent ils décidaient de dormir à la maison familiale de Lena. Alors vous étiez souvent seuls, tous les deux. Sauf quand Lei décidait d'inviter ses amis. Mais tu ne pouvais l'en empêcher, ce serait brimer sa liberté - même si tu n'avais qu'une seule envie, c'était de le garder pour toi.

C'était l'avantage de la nuit, du silence régnant dans les rues endormies d'Haptos. Tu aimais bien te promener dehors lorsque la lumière du soleil laissait doucement sa place à celles de la ville, grisonnant doucement (et si tu t'y prenais assez tôt, tu pouvais même entendre les petits “clics” lorsqu'ils s'activaient). Et puis, il y avait quelque chose de réconfortant à entendre vos pas réguliers sur l'asphalte et la gravelle, un après l'autre ; et tu pouvais même différencier les tiens de ceux de Lei par leur rythme et leur intensité. Parfois, les nuages décidaient de vous accompagner, laissant leurs voix souffler doucement l'air de leurs poumons, un vent sifflant lorsqu'il passait vivement par les fenêtres qu'on avait laissées ouvertes.

La nuit, c'était le moment où les grillons se réveillaient, chantant joyeusement leur spectacle à qui voulaient bien l'entendre. C'était tous les Pokémons qui profitaient du sommeil des humains pour sortir un peu de leurs terriers. C'était ces deux Gruikui, émergeant du buisson, et dont leurs chamailleries avaient alerté l'attention de Lei. Oui, tu ne pouvais pas lui enlever cela, ils étaient mignons.

“Tu es chanceux que je t'aime, toi. D'accord, on peut les garder.”

Tu disais ça avec une légèreté sans pareil ; au fond, tu étais heureux de rapporter ces petits Pokémons avec vous, parce qu'ils te faisaient un peu penser à Lei et toi, le rose scintillant étant évidemment Lei (il était si beau, si scintillant). Peut-être pourrait-il l'aider à lui redonner son éclat ? Tu avais déjà une idée d'accessoire pour le faire briller dans les vidéos d'idol (il serait une mini star).

Sourire. Le problème était réglé. Vous étiez arrivés à un compromis, une solution à laquelle vous étiez tous les deux d’accord. Mais rappelle-toi ceci, Baelfire, lorsque la fatigue prendra le dessus. Rappelle-toi cette promesse que tu lui as faite, une assurance à ta santé - ne te perds pas trop loin.

Le baiser sur ta joue te réchauffe, si bien que tu ressens des frissons parcourir tout ton corps ; c’est une sensation auquelle tu ne te ferais probablement jamais, tout cette affection dirigée sur toi et toi seul. Et pourtant, c’est bien le cas. En ce moment, il n’y avait d’yeux que pour toi. Et toi, tu ne voyais plus que lui, cette lumière dans ton obscurité, un phare pour t’accoster. Même les phares ont besoin d’une petite pause afin de changer leurs ampoules, parfois. C’était là que tu entrais en jeu.

Le “je t’aime” qui fait toujours aussi du bien, pour quelconque raison c’est maintenant toi qui as les larmes aux yeux. Ils se remplissent sans que tu t’y attendes, et ça vient te chauffer un peu le bas de tes paupières - tout à coup, elles se ferment rapidement, à répétition, effectuant ce même mouvement rapide sur tes yeux. Ta vision était maintenant embrouillée, et tu tentais fort de retenir les larmes, mais elles coulaient tout de même, pourtant sans que ce ne soit un ballon qui éclate comme Lei tout à l’heure, mais plus comme un ruisseau qui coulerait doucement, laissant son courant descendre la colline remplie de fleurs ; une petite descente, minuscule, tout juste assez pour qu’on la remarque, mais pas assez grosse pour que l’eau fasse quelconque bruit en arrivant en bas. On le voyait, ce ruisseau, si on s’arrêtait seulement pour y porter attention.

’Fire

Déclic, début d’une prise de conscience dégageant, débarrassant tes épaules du poids immense. Tu te débrouilles bien. Déjà décalé de cette société, tentant désespérément de déchiffrer - décoder - ses moeurs ; maintenant, découvrir l’archipel t’apportait un plaisir ayant déclôt en toi telle une rose au dégel, décorant la plaine de sa couleur. C’était un défi, défier tes peurs et te dérober aux dégâts que tes traumatismes déposaient sur toi, mais tu ne t’en dédis pas de cette promesse. Définitivement, déménager avait été une bonne décision, un début démontrant (développant) l’affection débordante - le désir, le dévouement même - que tu avais déclarées à Lei.

Oui, tu réalisais en ce moment tout ce chemin que tu avais parcouru, grâce à Lei. C’était son fantôme qu’il avait fait fuir, t’apportant avec lui dans son océan de merveilles. Dans ce monde, tu n’as pas besoin d’être autre chose que toi, tu n’as pas besoin d’être courageux, tu l’es seulement parce qu’il te donnait envie de l’être.

Ça te fait du bien, les contacts avec Lei. Enfin, la plupart du temps. Bien entendu, tu avais aussi besoin de ta bulle, de temps en temps. Lorsque ça arrivait, tu le communiquais à Lei. Il comprenait.
…
Parfois. D’autres fois, il comprenait… un peu moins. Mais c’est un peu de ta faute, à ne pas communiquer clairement tes besoins, à ne pas parler assez fort, tu sais ? Lei ne veut que ton bien, comme tu ne veux que le sien. Parfois, le doute revient en trombe et tu as peur, peur de le perdre comme tu n’as jamais eu peur auparavant - à chaque fois, tu as l’impression que la terreur est pire que la précédente (un cercle sans fin).

Mais il est là, il est là et vient essuyer tes larmes, vient effacer tes doutes. Il est là et vient recouvrir ton visage de ses baisers qui te font du bien, qui te relaxent, qui te soulagent. Il est là, maintenant, tu n’as plus rien à craindre ((mais le doute est toujours là, tapis dans l’ombre, attendant le parfait moment)). Tu lui souris, oh que tu aimes sa façon de voir toujours le bon côté des choses, sa façon de briller, parce que tu n’avais jamais vu quelqu’un briller de la même façon auparavant. Parce qu’il n’y aura jamais personne pour surpasser sa lumière.

Heureux, tu hoches la tête. Tu pouvais bien faire ça pour lui. Après tout ce qu’il avait fait pour toi, après t’avoir sauvé la vie, tu lui devais bien ça. Après t’avoir recueilli, t’avoir aimé, t’avoir fait sentir chez toi dans cet endroit inconnu, il serait ingrat de ta part de ne pas lui donner ce qui demande, un sourire en retour. Tu le regardes, de tes yeux les plus tendres, débordant d’amour. Tu le regardes et tu te rapproches un peu et tu te colles, profite de l’étreinte qu’il t’offre, de cette chaleur qui le compose. Et puis, ouvres la bouche, pour prononcer ces quelques mots.

“Tu n’as jamais arrêté, mon soleil.”

Parce qu’il était un soleil, et ton soleil n’arrêterait jamais de briller.

Doucement, commencer à penser, penser à rentrer à la maison. Il est tard, maintenant. Lei ne travaille peut-être pas demain, mais tu ne voulais pas non plus le retenir ici indéfiniment. Tu te sentirais trop mal, s’il n’allait pas bien durant la journée, à cause de toi. Il avait besoin de se reposer. Surtout comme vous alliez chez ses parents, durant la journée (il faudrait peut-être penser à les prévenir, lorsque vous irez). Tu savais déjà qu’il allait stresser et, à sa façon, dépenser cette énergie dans tes sauts, des petites courses du salon à la cuisine, des danses pour faire rire sa mère, n’importe quoi pour se sentir briller. Il te fait craquer. Tu espères vraiment que son père acceptera ta proposition, qu’il acceptera l’aide. Tu étais toi-même du genre à avoir de la difficulté à demander de l’aide aux autres, à avoir de la difficulté à l’accepter, alors oui, tu pouvais comprendre. Tu espérais seulement qu’il accepterait.

C’est toujours un bon moment que vous passez, lorsque vous allez chez ses parents. L’ambiance est légère, ses parents semblent t’aimer, alors ça te fait sentir bien. On pourrait même dire que tu te sens chez toi. Ce n’est pas facile de te faire sentir à ta place. Monsieur et Madame Ka’uhane, eux, y arrivaient.

“Tu viens ? On devrait rentrer.”

Prendre la main de Lei, doucement l’aider à se relever. Tu lui laissais le temps, t’assurais que ta voix ne le presse pas. Tu détestais toi-même lorsqu’on te poussait à aller plus vite, plus que ton propre rythme. Alors tu ne voulais surtout pas que les gens se sentent pressés en ta présence.
Mais, éventuellement, il vous faudrait rentrer. Pour dormir, mais aussi, tu te disais que les deux petits Gruikui avaient sûrement (peut-être) faim. Tu ne savais pas depuis combien de temps marchaient-ils, quand était la dernière fois qu’ils avaient mangé. C’est drôle, tu te dis. Car plus tu le regardes, plus le porcelet rosé te faisait penser à Lei.