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« Et donc, tu comprends, il faut vraiment que le refuge ait du soutien sinon ce petit Galekid aurait souffert si longtemps ! » — ça sonne faux, cette énergie presque insouciante et cette lumière et tout sonne faux. Ma voix, mes gestes, mon apparence ; ce n'est pas moi. L'absence n'est pas loin, les fonds océaniques s'agrippent à moi, refusent de me lâcher, essaient de m'entraîner. J'émerge d'un long sommeil ; mais je me souviens de tous les rêves. Ses tremblements, suppliques et elle qui me retrouve dans les ruelles de Kopadia et ma violence, violence éclatant contre cette ordure. Mais je ne vaux pas mieux que lui ((je suis le monstre des placards)). J'émerge d'un sommeil dans lequel j'aurais souhaité demeurer. Reprendre le court de sa vie après les abysses semble si complexe, épuisant. Chaque geste vient puiser dans une réserve à sec. ((Et si fade la vie après le rush)) l'entre-deux m'a toujours révulsé.

Elle me sourit, la femme ― elle se prénomme Alicia ― alors qu’elle prend le flyer en me remerciant et m’assurant qu’elle y prêterait une attention poussée ; parce que vraiment, les Pokémon ne devraient pas payer pour la cruauté et la négligence des êtres humains et que c’était horrible que ce soit le cas alors aider les refuges à aider les créatures représentait une nécessité. Acquiescer ― « t’es géniale, merci beaucoup ! » ― lui passer mon numéro lorsqu’elle me le demande ((passer du bon temps, c’est toujours intéressant, non ?)) mes côtes élancent encore lors de mes mouvements, quand je m’appuie distraitement dessus. Guérir est long quand tu ne prends pas le temps de te reposer et offrir l’occasion au corps de se remettre. Mais bouillonnait dans les veines la colère explosive et il fallait que j’aille dans les profondeurs de la montagne pour respirer (avant de me perdre pour toujours).

Dos contre le mur derrière moi, les habitants de New Pyra passent sans vraiment m’accorder un fragment d’attention ; pressés, ils ont tous quelque part où ils doivent se rendre. Est-ce qu’ils savent prendre leur temps, se poser, ralentir ? Suis-je bien placé pour parler d’un tel comportement ? Certes, je ne me précipite pas dans le travail jusqu’à plier sous le poids des responsabilités qu’on me refile ; pour autant, ralentir n’est pas quelque chose que je fais réellement. ((Je m’effondre, mais je ne lève pas le frein)) c’est une automobile qui fonce droit dans un arbre, accident et chaos, à la place de lever le pied de l’accélérateur. Ce n’est pas un état d’arrêt. Pour qu’ils s’arrêtent, me regardent, pour qu’ils m’écoutent, tendent l’oreille, je dois effectuer le premier pas, les héler ; leur adresser un quelconque signe qui les arracherait à leur contemplation, à leurs réflexions dont je ne connais strictement rien.

Heureusement que déranger les autres ne représente strictement pas un défi. Que je suis parfaitement capable de simplement m’installer aux côtés d’une personne et de commencer à lui parler sans la moindre hésitation, sans me questionner après coup ; sans me reprocher chaque mot et les réfléchir plus que de raison. C’est bien le seul point sur lequel je ne reviens jamais : ce que je dis aux autres, les interactions avec eux ; c’est bien là où l’assurance brille et ne faiblit pas, jamais. Parce qu’ils n’ont qu’à me prendre comme je suis et si je ne leur plais pas, qu’ils partent ((on ne peut être aimé de tous)) je l’ai toujours su ― sans doute que ça m’aide à ne pas me prendre la tête quand j’aborde aléatoirement ceux qui m’entourent. Je n’essaie pas d’être apprécié.

Flare à mes pieds et ce Flotajou aux couleurs d’explosions sur ma tête, à s’amuser avec mes cheveux ((nous nous sommes rencontrés dans la forêt de Calléis, alors qu’il s’était décidé à tomber sur ma tête et refusa de descendre, visiblement confortable dans ma chevelure)) alors je n’ai pas cherché à la forcer. C’est de la bonne compagnie, il est généralement calme et ne tire pas trop mes cheveux, il peut donc rester. Kérosène aussi est de sorti. Mais pas Éclipse. Je ne retrouve toujours pas Éclipse ― je ne sais pas du tout où elle est et ce n’est pas normal, parce que c’est sa Pokéball même que je n’arrive pas à dénicher sauf que je mets toujours mes sphères métalliques au même endroit justement pour ne pas les égarer.

((avec cette angoisse dans l’esprit, se concentrer)) distribuer des flyers, ça ne peut qu’être amusant, distrayant, me laisser naviguer un peu plus loin des eaux troublées de tempête ― découvrir de nouvelles personnes, discuter, apprendre à les connaître et simplement, respirer un air plus frais que celui de ma chambre dans laquelle je suis resté si longtemps ((enfoncé dans les ténèbres)) incapable de me lever. Respirer ― et aborder un jeune homme ; « Hey ! Comment vas-tu ? Il fait beau non ? Je suis là pour familiariser les gens avec le refuge de New Pyra qui est envahi de nouveaux Pokémon à soigner, sauf que le gouvernement ne les finance pas vraiment alors, ils ont besoin de dons. T’y crois, toi, que dans la dernière année, ce sont 50 Laporeilles qui ont été relâchés tout de suite après la période des fêtes ? C’est encore pire après Pâques ! » Parler, parler et continuer de discuter. Il ne se montre pas vraiment réceptif, mais repart quand même avec un flyer. Et c’est déjà une victoire.

Parce que je me doutais bien en acceptant cette quête que tous n’allaient pas m’écouter avec des étoiles dans les yeux. Ils ont des endroits à aller, des gens qui les attendent ou simplement, un cœur fermé et un esprit égoïste. Ce n’est pas grave. L’important, c’est d’essayer et s’ils prennent au moins un dépliant, c’est tout ce qui compte. Oh. Tiens, est-ce que c’est vraiment … ? « Bae ! »

Les rires, les discussions, les pas résonnant sur l’asphalte ― je suis entouré d’une population qui vit (qui respire) et je m’emplis les poumons de cet oxygène semblant si loin, si inaccessible, à ma personne. Alors que toi, toi, tu m’entends et tu te retournes, quand je te hèle. Mes pamphlets dans les mains, et les tiens que tu tiens fermement. Aisé de remarquer et réaliser que tu n’es parvenu qu’à en distribuer un strict minimum ; contrairement à ma pile visiblement diminuée.  Aisé de remarquer et réaliser que tu n’es parvenu qu’à en distribuer un strict minimum ; contrairement à ma pile visiblement diminuée.  

((Ton sourire)) et mon œil qui étincèle légèrement en réponse à ce geste ; parce que mes lèvres ne s’étirent que très rarement pour illuminer d’un sourire le quotidien de ceux qui m’entourent. Et quand ça se produit, ce n’est rien de plus qu’un masque, un costume, un déguisement, un « tout va bien » quand le sol sous nos pieds s’effondre bruyamment, un « ce n’est rien » quand les entailles se réinventent hémorragies impossibles à arrêter. Alors non, je ne te souris pas, parce que je n’ai aucune raison d’enfiler un masque aujourd’hui. Il faudra se contenter de ma pupille éclairée légèrement, se contenter de l’enthousiaste qui cherche à contaminer un peu mes gestes, chasser la lourdeur du sommeil et du brouillard et de la colère et des high brutaux et des down envahissants, dont les lianes épineuses s’entourent encore autour de mes poignets et de mes chevilles.

Notre première rencontre flotte encore dans mon esprit, alors que Lei venait tout juste de nous rejoindre dans sa cuisine, ton poing sur mon visage et mon rire léger, loin d’être provocateur, simplement amusé ― quelques semaines après, l’état différait ((heureusement que ce n’était pas à ce moment que ta colère s’abattit). Le résultat aurait été hautement différent, si tel avait été le cas. La douleur déjà ancrée dans chaque respiration se serait décuplée en encaissant le coup ; et je ne pourrais dire quelle aurait été ma réaction ; imprévisibles pensées, je ne sais jamais quand le volcan entre en éruption. « Exactement ! J’me suis dis que la popularité du champion d’Adamantia servirait très certainement. » alors que je te donne un léger coup d’épaule amical.

Et qu’à l’instant où ton regard se perd au loin, attiré par je ne sais trop quel stimulus, je glisse entre tes flyers une petite lettre dont l’enveloppe réside désormais dans le recyclage ― lue tout juste avant que tu n’entres dans mon champ de vision. Parfaitement conscient de mes charmes, de mon charisme, parfaitement conscient de l’effet que je peux avoir sur ceux qui m’entourent ((encore plus quand je m’égare à les courtiser sans arrière-pensées)) cette missive d’une admiratrice secrète te servirait davantage qu’à moi. Après tout, toute tentative de relation prolongée à mes côtés s’avérait vouée à l’échec ; ce n’était donc pas dans mes plans de la retrouver pour lui promettre milles merveilles que je ne saurais lui apporter. ((je suis l’orage, l’ouragan ; le typhon qui rase tout sur son passage sitôt on laisse la porte de son univers ouvert à mes pas)) ― éternellement se tenir éloigné des cœurs pour ne pas les abîmer, ne pas les écorcher.

Je peux parfois exceller en tant que grand frère, je n’ai jamais su ne serait-ce que briller d’une faible flamme quand il s’agissait d’être petit ami ― simplement d’apporter larmes et détresse profonde. « Tiens, y’a un truc qui dépasse de tes papiers. » Visage de marbre qui ne trahit rien d’autre que de la curiosité (feinte) j’ai toujours été bon acteur ((j’ai appris très jeune)). Alors que j’adresse un grand signe de main à un jeune homme que j’estime tout juste majeur pas trop loin de nous, pour qu’il s’approche. Intérêt piqué, il nous rejoint en de grandes enjambées.

« Heyy, moi c’est Oyaris ! Et quel est ton beau prénom ? » La voix suave, les intonations charmeuses ; simplement ma nature, simplement mes habitudes ((que je ne pourrais jamais chasser)) ― peu importe à quel point j’essaie. Parce que ce comportement, je l’hérite d’un paternel auquel je souhaite tant ne pas ressembler. Un paternel que je n’ai jamais su rendre fier, duquel je n’ai jamais réussi à obtenir l’approbation ((vide cruel qui résonne éternellement)) que je ne pourrais jamais combler. Notre nouvel interlocuteur se présente comme étant James et c’est joli comme prénom « Et voici mon ami Bae’ ! » pour que tu puisses participer à la conversation.

Les relations sociales, c’est mon domaine ; c’est là que je rayonne de milles étincelles. Je suis ce papillon volage, social, qui butine un peu partout, qui se mêle à n’importe quel groupe, avec une aisance facile à envier. Je ne peux expliquer pourquoi ça me vient facilement, pourquoi je ne doute pas, pourquoi j’atteins rapidement les cœurs et charme les esprits. C’est simplement le cas. Peut-être que c’est juste le produit de ma personnalité. « Alors en gros, on est envoyé par le refuge de New Pyra, tu en as sûrement entendu parler ? Je vois que t’as un Emolga sur ton épaule ! » ((mes pensées dérivent vers Mora involontairement)) chasser les réflexions, ne pas s’y perdre.

Un coup d'oeil en ta direction pour t'enjoindre à prendre la parole. Ça s'apprend, parler aux gens.