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La noirceur s'étend et se mélange à la brume, les extrêmes se disputent la place et je reste là. Immobile, en équilibre au bord du précipice, où geysers et volcans pourraient entrer en éruption. ((if i never wake up again, remember me just as i'm breathing before you)); le temps se perd et se bouscule, les secondes s'effritent et Eagle, et les montagnes, le danger qui y régnait; ne rien laisser l'atteindre et la blesser ((je refuse)) — et mes mains qui préparent le solvant en attendant que Miroir et Mora arrivent.
there must be something I could say

La fatigue en arrière-plan, mais jamais tout à fait présente, enfouie sous les réminiscences des derniers mois. Le froid qui s'empare encore de mes os ((et les excuses jamais prononcées ; all these things I never told you ; les regrets lourds sur le coeur)) les blessures apparentes cicatrisées, mais un mouvement brusque, une petite toux, ravivent la douleur incrustée dans les fibres de tous les tissus. Be pas s'y concentrer. Se réfugier temporairement dans le bureau pour caler une boisson énergisante avec deux comprimés d'ephedrine. Juste pour mieux se concentrer. Juste pour mieux tenir. Juste pour chasser le brouillard un peu. Quelques minutes, une journée. Respirer.

Nous y sommes presque. L'antidote sera bientôt fonctionnelle. Retourner dans le laboratoire, nettoyer les mains et les bras jusqu'aux coudes ; enfiler le sarrau et rejoindre le Spododo attendant sagement. En attendant mes collègues, j'avançais sur mes recherches personnelles. Mais ils ne devraient plus trop tard, alors il est temps de préparer le matériel, les solvants et solutés, calibrer les appareils.

Devant la cage d'Essence, je ne peux m'empêcher de m'attarder un peu. « Ce sera mieux bientôt, promis. Je ne t'abandonnerais pas. » Ses yeux me fixent. Aucune reconnaissance de ma voix, de mes mots. Que la soif de sang, la violence profonde, ce besoin de me blesser et me laisser en lambeaux. Comme ce Furaiglon, sur le sentier des colons. Mais je ne laisserais jamais tomber. Nous approchons du but. Je le sais.

S'installer à nouveau à la paillasse, quand Miroir arrive. « Dormir est une perte de temps. » Fuir les cauchemars, fuir les rappels de mon existence, mes égarements et mes remords. Tout fuir. Hocher de la tête. « Tout est prêt. Les appareils calibrés. Attends. » M'approchant de lui, j'arrange son noeud papillon avant de le laisser aller prendre son café et se préparer pour être prêt à travailler. Parfois, quand il ne reste que nous deux au laboratoire, la ligne entre les relations professionnelles devient floue. Mais personne n'a besoin de le savoir.

((Mora arrive à son tour)) et ce sont quelques battements de cœur ratés, et c’est la neige dans la pupille, les suppliques au bout des lèvres et c’est le froid qui s’étend, prend toute la place ; le blanc de l’hôpital et les paroles tranchantes ébranlant toutes les fondations, l’incertitude et un an. Une année s’est écoulée, une longue année derrière nous. Les doutes, les excuses et la douleur, toutes enfermées dans un coffre-fort profondément enfoui dans le cœur ; ne rien laisser paraître. Les ombres d’un orage prêt à éclater n’appartiennent qu’à moi. ((les souvenirs traînent et les cauchemars prennent racines dans le passé qui nous relie)) « Bonjour Mora, toujours aussi belle ! » Légèreté et habitudes ancrées dans mon comportement, masquant hésitation et incertitude pour se concentrer sur le temps présent. Sur les objectifs qui nous attendent, sur Lentis qui compte sur nous. Tout le monde remettant entre nos mains le futur de leurs Pokémon.

« On pourra tester sur Essence. Dans le meilleur des cas, elle va mieux. Dans le pire des cas, elle y succombe. » Peut-être que mes paroles paraissent froides, mais si je ne peux pas ramener ma meilleure amie, ma compagne, celle qui est là depuis Galar, qui nous suit, avec qui je me suis combattu, celle qui a risqué sa vie pour la tienne lors du Furaiglon… je lui préfère la mort à cet état. Voix froide, voix tirant dans les intonations de début Janvier, dans la colère noire, dans l’amertume profonde, mais voix épuisée, voix sans énergie, lassitude.