Une inspiration, dans l’air froid et sec d’Adamantia - Moira se sentait reprendre souffle, un peu plus en vie désormais qu’elle était chez elle, loin de la chaleur étouffante haptaise et de l’oeil des caméras avides de leur perfection irréprochable comme de leurs échecs les plus cuisants. À croire qu’elle n’était jamais plus en paix, plus en sécurité qu’ici, dans les murailles de sa citadelle déjà ployée sous les flammes, dont il lui semblait encore sentir l’âcreté immonde, qui continuait de la prendre à la gorge dans certaines des allées de la cité qu’elle aimait tant.
Le ciel était gris - le brouillard, dans les hauteurs d’Hoarford, dévorait les toits des bâtisses et les clochers des églises.

Dans son dos, ceux qui l’avaient accompagnée jusqu’à New Pyra commençaient déjà à se disperser, libérés de leurs devoirs à l’instant où les registres avaient été signés. Resserrant son manteau sur elle, la dirigeante se tourna lentement en direction de celui qui se tenait le plus près d’elle - toujours là, que quelques pas en arrière ou de côté, jamais très loin, présence rassurante qui lui rappelait qu’elle n’était pas seule (même lorsqu’elle était l’imposture ; celle qui avait volé Adamantia aux mains de sa soeur et qui n’avait fait que la précipiter à sa perte).
Moira- Moira avait beau vouloir se convaincre qu’Irisis n’aurait pas fait mieux, la vérité… C’était qu’elle n’avait rien changé. Si son île de coeur aurait autant souffert entre les mains de sa cadette qu’entre les siennes, alors, que faisait-elle au pouvoir ? Qu’avait-elle à apporter, que pouvait-elle-

Xerneas.

« Yulian ? » souffla-t-elle doucement, presque prudemment, la voix mesurée comme de crainte de ciller alors qu’elle n’était dissimulée par aucun mur, protégée par aucune porte close (elle devait tenir, sûre d’elle et impavide, parce que si elle cédait sous les yeux du monde, alors, qui lui accorderait encore le crédit dont elle avait besoin pour croire un jour pouvoir renverser toutes ces choses qui la clouaient au sol désormais ?) « Es-tu… Accepterais-tu de m’accompagner jusqu’à la crypte ? Je comprendrais que tu aies à faire, mais ce ne sera pas long. » Ses prunelles cherchèrent celle de l’homme, à ses côtés ; et elle fit de son mieux pour y plonger et puis s’y perdre, essayant d’y noyer les craintes qui l’étreignaient mais qu’elle ne pouvait pas épancher, ici, sous l’arche qui servait d’entrée à la ville et sous l’oeil des passants.

Lorsqu’il lui emboîta le pas, ses épaules se relâchèrent, d’un rien, et elle respira un peu plus facilement ; comme si un poids s’était ôté de son plexus, et qu’il était un peu plus simple de tenir la tête droite et le menton levé.

Le silence de la crypte qui perçait le flan de la montagne au pied de laquelle Hoarford avait été bâtie les accueilli, bientôt, comme un refuge, et la lumière que les cristaux y reflétaient l’éblouit quelques instants. Elle se laissa prendre au jeu, cherchant son image clairsemée dans les facettes polies des pierres incrustées dans les murs. Quelque part, là-bas, dans les rangées de stèles finement gravées, se trouvait celle de son père ; son géniteur, un homme qu’elle n’avait pas connu et qui l’avait faite bâtarde, fille d’adultère et enfant d’une revanche d’adultes dont elle avait été le pion jusqu’au sommet…

(Que restait-il, désormais, sinon de se tenir là sans être certaine de savoir pourquoi ?)

« Crois-tu… » Sa voix résonna contre les parois, et elle se tut un instant, laissant mourir l’écho entre les tombes. « Crois-tu que nous ayons échoué ? Que nous aurions dû… Je ne sais pas. Mieux chercher l’enfant, lui donner ce qu’elle voulait ? » Moira l’avait voulu. Elle avait voulu le trouver, elle avait voulu l’utiliser, le lui vendre pour acheter la paix. Elle avait fait remonter tous les registres d’entrées et de sorties de ces trois dernières années, sans rien trouver qui puisse coïncider.
Qu’aurait-elle pu faire de plus…?

« J’ai l’impression d’avoir manqué aux promesses dont je m’évertue à bercer les Adamantois… » Elle cillait.
L’air un peu moins fière, l’air un peu plus fragile ; parée de ses airs moins reine et plus humaine, comme elle ne se l’autorisait presque jamais. De quoi aurait-elle l’air, si on la pensait faible et qu’on se rendait compte qu’elle doutait, lorsqu’elle était censée être la figure de proue d’un navire qu’elle ne devait pas laisser aller à la dérive ?

Mais elle cillait.
(Et c’était de son ami de toujours qu’elle avait besoin, dans les brumes d’Hoarford semblables à celle de son coeur, pour ne pas se laisser prendre l’eau et perdre cap.)

(c) TakeItEzy

26/07/2023

C’est avec bonheur que Yulian accueille le vent froid qui souffle sur son visage dès lors qu’il met un pied sur l’île d’Adamantia. Il n’en montre cependant rien, prenant soin de garder son masque de glace bien en place, mais il ne peut nier le soulagement qu’il ressent à l’intérieur. Ils sont de retour chez eux. Le Solem est fini, enfin et à présent à nouveau sur l’île de l’hiver éternel, il peut finalement laisser le vent emporter au loin toute l’anxiété de ces dernières heures.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas parce qu’un Solem va se passer à Haptos, comme celui d’aujourd’hui, qu’il y aura moins de risque que s’il se déroulait sur l’unes des quatre autres îles. Oui, même Adamantia. Yulian aime profondément son île natale, mais il faut être réaliste. La destruction de la serre par un Pokémon obscur, bien que n’étant pas liée à un Solem, n’est qu’une preuve qu’Adamantia n’est pas à l’abri de tout danger.

Mais les craintes de Yulian n’ont jamais été aussi fortes que depuis l’apparition d’Ivanna Scheinberg. La première fois qu’il l’a vu, bien que ce n’était qu’à travers un écran, cela a fait résonner une sonnette d’alarme qui criait « danger » dans son esprit. S’il l’appelle la « sorcière d’Aureas », ce n’est pas par simple méchanceté. Il a un mauvais, très mauvais pressentiment au sujet de cette femme. Et ce sentiment n’est pas près de disparaitre.

Sans l’ombre d’un doute, la présence de Scheinberg met sa patience et son contrôle de soi à rude épreuve. En particulier parce que Moira participe à ses Solem. Moira a dû faire face à cette folle. Deux fois. Qu’il lui arrive quoi que ce soit est réellement l’une de ses pires peurs. Et il sait qu’il ne se le pardonnerait jamais.

Il déteste absolument savoir Moira dans la même pièce qu’Ivanna et, aujourd’hui encore, la présence des autres dirigeants et du représentant d’Anthos n’a pas suffi à empêcher l’appréhension de tranquillement s’invité alors qu’il ne lui a rien demandé, enveloppant son cœur dans son étreinte insidieuse, serrant à chaque seconde un peu plus, toujours un peu plus, lui imposant ainsi son insupportable présence, finissant petit à petit par prendre toute la place sans aucune gêne.

Ceux les ayant accompagnés se dispersent, mais Yulian, lui, ne fait aucun geste pour s’éloigner. S’il reste, ce n’est pas par simple devoir. Plus maintenant.

« Bien sûr. »

Son regard croise celui de celle qui, au fil du temps, est devenue une véritable amie. Pour Moira, il aura toujours du temps, il répondra toujours présent. Après tout, se soutenir, s’épauler, être là lorsque l’autre en a besoin, c’est ce que font les amis. Ainsi, c’est sans l’ombre d’une hésitation qu’il lui emboite le pas.

Et sans un mot de plus, aussi, gardant le silence tout au long du trajet. Il n’a jamais été très bavard, c’est simplement dans sa nature. Même à l’intérieur de la crypte, c’est à nouveau Moira qui rompt le silence.

« Tu as fait tout ce que tu pouvais avec les informations que tu possédais. Comme l’a très justement souligné Mademoiselle De Fiercastel, Scheinberg n’a donné aucun nom ni fournis aucune description. »

Soi-disant pour la sécurité de l’enfant. C’est du moins ce qu’Ivanna a prétendu lors du Solem, en tout cas.

Honnêtement, dire que Yulian est septique au sujet de cette histoire d’enfant aux mains lumineuses est un euphémisme. Un enfant avec des mains qui brillent, franchement ? Pourquoi pas un enfant avec des ailes ou une auréole lumineuse sur la tête pendant qu’elle y est ? Lui qui ne croit pas en l’existence d’un quelconque être divin, pour qui les Pokémon luminescents ne sont rien de plus que des Pokémon un peu particulier à l’image des Alpha ou des chromatiques… il ne croira à cette histoire que le jour où il rencontrera en personne cet enfant et qu’il verra ses mains lumineuses de ses propres yeux.

« En supposant que cet enfant existe réellement, je ne suis toujours pas favorable à l’idée de lui remettre. Je dois admettre être de l’avis de monsieur Finch, sur ce point. »

Yulian avait d’ailleurs déjà clairement exprimé à Moira sa réticence à l’idée de sacrifier cet enfant aux griffes de cette femme, cette inconnue dont ils ne savent rien et qui ne lui inspire aucune confiance. Et c’est cette absence de confiance qui le pousse à penser que ce n’est pas cela qui aurait permis aux Adamantois de dormir sur leurs deux oreilles.

Mais… peut-être, au fond, qu’il manque d’objectivité sur ce coup, car, il faut l’avouer, son désir de ne pas céder au chantage d’Ivanna vient aussi de son ressentiment pour cette femme qu’il juge responsable de l’attaque qui a causé la destruction de la serre et la mort de plusieurs Adamantois.

Cela dit, il ne soutient en aucune façon les quelques coléreux qui appellent à la guerre. Se défendre, oui, protéger les leurs, oui. Mais une guerre ne mènerait nulle part. Ce n’est pas la solution.

« La situation n’est pas à notre avantage, certes. Mais ce n’est pas terminé, nous n’avons pas encore perdu. »

Si sa voix ne trahi aucune émotion, il y a dans son regard la lueur d’une détermination farouche. Jamais il n’abandonnera. Peu importe à quel point l’obstacle auquel ils doivent faire face semble infranchissable, il continuera de se battre, de chercher un moyen de le surmonter.

In rp, Valkyrie (Rosélia) est sous sa forme de Rozbouton, n'ayant pas encore évoluée à l'époque.

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Défis luminescents :
01.10 SYNONYMES
Appréhension : Anxiété, craintes, alarme, pressentiment, doute, peurs.
03.14 « L’APPRÉHENSION... »

En 74 mots:

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(c) TakeItEzy pour Be.Wild

02/10/2022

cracks beneath our feet catch our fall

24 juin 2023 - retour du Solem.

Moira, silencieuse, écouta. Elle laissa la voix de son ami, familière et réconfortante, tenter d’apaiser ses tourments ; elle laissa le calme et la raison qui portaient toujours ses mots à lui l’atteindre - tenta d’emprunter un peu de la distance qu’il tenait entre sa présence et les décombres, non sans envier la façon qu’il avait d’y parvenir. Il portait, pourtant, sur les épaules, les mêmes soucis qu’elle. C’était la croix qu’il portait pour se tenir à ses côtés - comment faisait-il pour ne pas ployer ?

« Je crois que Teobald n’a, en effet, pas manqué d’esprit, pour cette fois, » souffla-t-elle tout bas, laissant ses prunelles quitter son ami pour ricocher sur les pierres scintillantes qui donnaient à l’endroit des allures éthérées. Teobald était un homme intelligent, Moira ne pouvait le nier - elle regrettait cependant que son intelligence ait été plus souvent mise au service de son blason et de ses prouesses qu’à celui du bien commun.
Quoiqu’il avait changé, songea-t-elle ; ou bien peut-être n’avait-elle eu qu’une vision trop partielle et partiale de lui avant de prendre la place d’Irisis à la tête d’Hoarford et au siège des Solems - peut-être qu’il avait toujours été ainsi, mais qu’elle ne l’avait jamais vu.

Il leur avait tendu la main sans hésiter, offrant main d’oeuvre et ressources sans l’ombre d’une hésitation - quand bien même s’agissait-il d’une dette qu’il devait à sa soeur, il avait semblé affecté par l’idée que Moira puisse douter de son honnêteté.
Aina-Kea avait raison… Depuis longtemps, désormais, l’heure n’était plus à savoir qui était fautif ou innocent - ils étaient tous menacés par les plans d’Ivanna.

Et elle, qu’avait-elle fait ? Sinon songer à utiliser l’enfant, sinon songer à le trouver pour céder aux demandes d’Aureas ? Qu’avait-elle fait, sinon plier avant même d’avoir une chance de contester ? Ce n’était qu’un enfant, que ses mains brillent ou non, que quelqu’un l’attende à Aureas ou pas - Alice était juste.
C’était à celui qu’on cherchait de décider.

Mais pouvaient-ils vraiment remettre leur avenir, leur sécurité, la vie de leurs propres enfants à la décision d’un autre, qui avait fui ?
(Quels êtres immondes seraient-ils, s’ils le renvoyaient de force là d’où il s’était échappé ; dans un pseudo-foyer pour lequel il ne s’était pas manifesté ?)

L’enfant était mort, ou n’avait pas envie d’être trouvé.
Que pouvaient-ils faire, alors, mis au pied du mur, aveugles aux dangers qui viendraient peut-être les balayer ?

« Nous n’avons pas encore perdu… » répéta-t-elle, sans reposer les yeux sur Yulian. « Mais qu’y a-t-il à gagner si nous ne livrons pas bataille, dis-moi ? » Ce n’était qu’un murmure - un chuchotis qui résonna pourtant plus fort qu’elle l’aurait voulu, entre les stèles et les pierres.
Elle soupira - la question n’attendait pas de réponse. Elle ne désirait pas mener les siens à la guerre, elle ne voulait pas livrer bataille ni voir couler le sang des Lentois, abreuver leurs terres de la vie d’un second peuple assassiné par ses propres folies.

« Ils n’ignorent rien nous concernant, et nous ignorons tout d’eux. Si Aureas a envoyé quelqu’un pour attendre l’enfant, combien d’autres pions ont pu être envoyés pour infiltrer nos villes, nos vies, rapporter nos avancées, nos failles, nos plans à Scheinberg ? » Aureas avait connaissance de ces pierres d’obsidienne étranges qui s’érodaient dans le sol d’Eyepolis - Ivanna en connaissait les propriétés, les effets, les dangers, et avait su manipuler Teobald, Deus, New Pyra, Lentis toute entière, sans même s’être encore présentée. De quoi était-elle capable, désormais qu’elle n’avait plus à se cacher ?
Désormais qu’elle les avait ouvertement prévenus, menacés ; désormais qu’ils savaient qu’elle ne leur pardonnerait pas leur manquement ?

« Et Lentis, qui se meurt… » Plus que Yulian, Moira avait foi en la terre sur laquelle elle était née ; elle portait Xerneas et les croyances prudentes et ferventes dans lesquelles on l’avait élevée au coeur, malgré elle - parce que si ce n’était pas Sa Volonté, s’Il n’était pas là pour les guider, que leur restait-il pour espérer ? « Ivanna semble savoir tant de choses, sur nos terres, que nous ignorons, sur ce passé qui n’est écrit nulle part, et je… Je me demande, parfois, si nous ne sommes pas dans l’erreur. »

S’ils n’étaient pas qu’un cataclysme, dont Ivanna essayait de protéger une terre qui lui était plus chère qu’elle ne leur serait jamais, à eux qui s’était auto-proclamés possesseurs.

« J’ai peur de m’égarer, Yulian, et d’égarer les Adamantois avec moi. » Elle reposa les yeux sur lui. « Que ferais-tu, si tu étais persuadé que j’avais tort ? Si mes décisions, un jour, devaient bafouer tes valeurs ? »

Hype ♥

(c) TakeItEzy

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