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Un simple baiser. Un au revoir bien plus long que prévu à un amour désormais perdu dans l’oubli.

Tout semble irréel… je me vois marcher vers la porte d’entrée, ouvrir lentement la porte pour ne pas réveiller la grande et riche famille Thetford. J’entend le faible grincement alors qu’elle s’ouvre. Mon sang se glace tout d’un coup. J’ai peur. Mais pourquoi ? Il fait noir, trop noir pour que j’y vois quelque chose sans m’approcher, mais j’ai le pressentiment que je sais ce qui s’en vient. Malgré tout, je m’approche vers le salon, là où je note la présence de la faible lumière diffusée de l’extérieur par les lampadaires qui éclairent la rue. Faire demi-tour, quitter avant qu’il ne soit trop tard. Éviter la confrontation…

Des silhouettes se dessinent doucement dans l’ombre et, au pas final, je les reconnais : mon père, accompagné de ma mère appuyée contre lui. Ils sont juste assez éclairés par la lumière provenant de la fenêtre pour que je comprenne enfin avec l’expression qu’ils ont au visage : ils ont tout vu. Leur fils unique, épris d’un amour à leurs yeux interdit, malsain. Mais… serait-ce un sillon de larmes qui brille sur le visage de maman ? Et le regard de papa… de quoi brille-t-il ?

De colère. Non, pire, de haine.

J’aimerais parler, crier, quitter en courant ce lieu à cet instant précis. Parce que c’est là que tout à commencé à s’effondrer en moi. Mais je n’habite pas mon corps : il est figé, peu importe à quel point je lui crie intérieurement de faire demi-tour et de courir. Rien, juste ce silence pesant finalement brisé par un murmure pour commencer. À peine perceptible, mais pourtant j’arrive à le comprendre.

« Disgrâce »

« Honte »

« Tu n’es pas bienvenue ici »

« Les gens comme toi ça me dégoute »

Les murmures devenus cris, je reste tétanisé sur place, incapable de me boucher les oreilles, incapable d’émettre le moindre son. La silhouette de mon père s’avance dangereusement, grandissant à chaque pas jusqu’à ce que son ombre me surplombe entièrement. Ce n’est qu’une fois son poing levé que mon corps réagit enfin. Je pivote vers la porte et je cours comme jamais je n’ai couru auparavant. Le couloir me séparant de la sortie semble s’allonger, et derrière moi résonnent les pas lourds et envahissant du maître de la maison se rapprochant à une allure folle. À bout de souffle, mon sang précédemment glacé s’embrase rapidement, et ce n’est qu’une fois que je passe le seuil de la porte qu’enfin je respire. La porte se claque, puis tout s’éteint

Réveil brutal, il n’y a pas meilleurs mots. Le corps alourdi par une nuit de sommeil troublée sur un matelas de fortune acheté par l’école pour leur dortoir étudiant, je peine à me lever. Deux ans maintenant. Deux ans que j’ai atteint la majorité mais surtout deux ans depuis que je suis parti. Pourquoi me rappeler cette nuit troublante où tout a basculé. Je me souviens encore de la vitesse à laquelle je suis parti le lendemain, boîtes faites à la hâte au courant de cette nuit de larmes. La légende raconte que je n’ai plus pleuré depuis ce soir-là, le jour de mes 16 ans.

Quand j’y repense aujourd’hui, je peine à croire ce que je suis devenu. J’aurais pu affronter, j’aurais pu tenter de raisonner, de comprendre mais… j’ai préféré fuir, fuir sans prendre le temps d’assimiler ce qui venait d’arriver. Le lendemain de cette horrible discussion, j’étais parti en laissant pour seule trace de mon départ une lettre adressée aux deux personnes qui m’avaient élevé. Sans dire où je vais, sans laisser de traces pour me retrouver. Johto n’a jamais été fait pour moi de toute façon, je l’ai toujours pensé. C’est pourquoi avec l’argent de poche mensuel accumulé au fil du temps, j’ai réussi à prendre un vol vers Sinnoh assez rapidement.

Adieu papa, adieu maman.

16 ans, c’était tôt pour vivre seul dans une région que je ne connais pas, mais ça m’a forgé. J’ai su développer un caractère, une façade qui me permettait de me protéger du monde extérieur. J’ai commencé à travailler dans un petit restaurant du coin à Frimapic dès mon arrivée et par chance, j'ai trouvé un logis avec deux colocataires. Très peu de place pour trois, mais ça faisait l’affaire, et le luxe n’était pas une priorité pour moi, ou du moins, ne l’était plus autant qu’auparavant. La famille Thetford avait son lot de problèmes, c’est certain… mais l’argent n’en faisait pas partie. riche fonctionnaire des centres Pokémon de Johto, mon père s’était bien graissé la patte au fil des années, d’où cet argent de poche économisé, d’ailleurs. Mais bref. Ayant visité bien souvent les nombreux centres de Johto, j’ai pu observer le travail de vétérinaire d’assez près, sans compter la rencontre de plusieurs de ces gentilles créatures. Je suis allé à l’école dans le simple but d’attendre ce rêve qui germait en moi : devenir comme eux, soigneur des blessés et des innocents. Quand je dis eux… je ne parle pas de mes parents, juste pour préciser. Être fonctionnaire n’est rien de bien gratifiant : rester dans un bureau toute la journée à taper des courriels plus ou moins importants à des gens dont on se souvient du poste seulement grâce à leur signature électronique, ce n’est pas ça qui change le monde.

Depuis mon départ, j’ai décidé de ne plus laisser savoir aux gens qui m'entourent que je suis différent. À la place, j’ai revêtu une armure qui me protégeait des jugements, une couverture glacée presque impénétrable peu invitante. Je n’ai pas un physique intimidant, donc j’ai dû me trouver un autre moyen de garder mes distances avec les autres.

Malgré les nombreuses heures de travail nécessaires pour arriver à tout payer, j’ai fini par rejoindre l’académie d’Unionpolis en soins vétérinaire dès l’âge de 18 ans. C’est dans ces années que j’ai enfin réussi à caresser du bout des doigts un rêve pendant longtemps crû inatteignable. Le truc, c’est que rien ne s’est produit d’intéressant dans ces années-là… à part Lys.

Lys, ça a été maon patron·ne, un·e grand·e ami·e qui m’a rencontré sur le coin de table d’un café. Assis entouré de papiers scolaires et de CV à distribuer pour un nouvel emploi, cette personne s’est approchée de moi à la vue de mes résultats scolaires et de mon programme d’étude. Étant iel même un·e directeur·ice de refuge, iel a demandé mon aide pour les cas moins importants et graves de son refuge. Comme étudiant, il n’y a rien de mieux pour l’apprentissage que de nager le plus tôt possible dans l’océan du marché du travail et puis… la paie était plus prometteuse que celle des restaurants pour lesquels j'ai travaillé avant.

C’est donc à l’âge de 22 ans que je commence le travail dans le refuge, à soigner les cas que j’avais déjà vus en classe et à apprendre sur le tas en observant Lys et les autres vétérinaires. Notre relation était, disons, tumultueuse au début, notamment pour mes commentaires assez direct et tranchants et sa personnalité plus émotive. Lys a néanmoins été la première personne à percer mon armure, surtout suite à un accident en stage qui m’a donné une commotion cérébrale. J’ai eu beau vouloir lui caché… j’ai succombé à un moment et j’ai fléchi : j’ai pleuré de nouveau, pour la première fois en 6 ans. Cet épisode nous a rapproché malgré tout, rapproché par une vulnérabilité commune jusqu’à maintenant non-découverte. Iel l’affichait fièrement, je la faisait disparaître lâchement dès l’arrivée des premiers symptômes. C’était bien là, notre plus grande différence.

Dire que j’ai grandi au refuge serait diminuer tout ce que j’y ai réellement appris. Lys m’as bien plus fait grandir que l’école et mes parents réunis, si je suis bien honnête… j’ai vraiment travaillé fort et su prendre tout ce qui m’a été lancé comme information, et comme expérience pour l’ajouter dans ma boîte à outil personnelle. Avec un diplôme en poche, il est devenu possible d’aider Lys désormais avec ses cas compliqué. Je n’ai jamais quitté cet endroit : c’est devenu ma deuxième maison . Je me suis d’ailleurs lié d’amitié avec plein de Pokémon, mais surtout Sparkles, le feunnard d’Alola de Lys, et Vlin, une Snubull très affectueuse malgré les apparences.

Un jour de janvier, Lys m’accueille avec une nouvelle troublante ; fraîchement trentenaire, la personne qui me fait le plus sourire m’attends avec une lettre qui vient de Lentis, plus précisément d’Adamantia et sa dirigeante. Un phénomène peu connu touche la faune là-bas, blessant plusieurs espèces de Pokémon de la région. Lys me demande d’y aller en son nom pour aider à améliorer la condition de l’endroit.

Et c’est sur le bateau que j’écris ces quelques mots qui parle de mon histoire, pour une raison inconnue d’ailleurs. Sparkles et Hlin sont avec moi et me rejoignent dans cette aventure. J’espère que tout se passera bien.