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Le rouge se reflétait dans le ciel et sur l'océan. Le soleil agonisait lentement, laissant ses couleurs jaillirent dans tous les sens pour un spectacle visuel et lumineux. Le brun observait le tout, assis sur une chaise haute à un bar au bord de l'eau. La sortie vacancière prendrait fin sous peu, et l'une des dernières activités de groupe était un concert sur la plage. Ce qui en soit, était plutôt cool, mais Peter redoutait que Volt s'amuse avec le matériel du concert. Il sirotait distraitement un jus de baies, perdu dans l'horizon et ses pensées. Ce fut le poids de son Brindibou qui le sortit de ses pensées, se posant sur son épaule. Peter le gratta vaguement sous le bec, se sentant quelque part entre la nostalgie et le vague à l'âme. Peut-être était-ce dû à la chaleur, au sable de la plage. Il en fallait finalement bien peu pour lui rappeler Rhodes, et même après six années loin de chez lui, son souvenir en était si clair que cela lui faisait mal.

Soupirant, le brun se fixa sur l'océan. L'étendue bleutée où le reflet s'étalait comme une tâche de sang était radicalement différente. Les embruns marins et salés parvenait jusqu'aux docks en bois, où les stands en tout genre s'affairait à attirer le plus de nigauds possibles. Il avait encore le temps avant le concert, mais il ne se sentait pas de rester à observer toute cette activité encore longtemps – particulièrement aussi proche d'un bar, même s'il n'avait pris qu'un jus de baies. L'appel d'une autre époque dans l'esprit, Peter se leva en se souvenant des paroles de son paternel, qui avait engrainé en lui des moyens d'échapper à cela. Alors il marchait, téléphone lévitant jamais loin, juste un touriste de plus dans une masse d'égarés.

L'endroit où avait lieu le concert n'était pas très loin de la ville, sur un coin déserté par les pokémons. De ce qu'il avait compris, c'était une démarche locale que de faire fuir les pokémons de l'endroit, pour le capitalisme. Certes, il pouvait comprendre l'appât du gain ; mais c'était peut-être trop, de mauvais goût même. Ces lieux magnifiques auraient dû pouvoir être habités par les pokémons également, peut être d'une manière où humains et pokémons pourraient cohabiter. Il ne comprenait pas que cela soit aussi difficile, ici comme ailleurs.

Alors il s'approcha de la seule chose qui l'ancrait dans la réalité : la technologie. Là, posée sur la plage, une scène temporaire avait été montée, et l'on s'affairait à poser enceintes et autres appareils sonores. Sur l'échafaud qui surplombait la scène, des projecteurs et des lumières, prêts à illuminer la foule qui serait sans doute nombreuse. A côté de lui, son téléphone semblait vibrer d'impatience, tandis que Miles se contenta d'un petit coup de bec sur le haut de son crâne, avant de regarder d'un air menaçant le Motisma. Efficace, vu comment la lévitation s'amoindrit pour revenir à une hauteur normale. Haussant les épaules, il se rapprocha du liseré océanique, posant son bras comme un perchoir où le hibou s'aventura. Il déploya ses ailes – comme un vrai petit chasseur – et pris son envol, envoyant les cheveux de son dresseur dans tous les sens au passage. D'autres personnes commençaient à arriver au fur et à mesure, et l'endroit serait bientôt noir de monde ; autant en profiter un petit peu avant.

La décharge électrique qu'il subit le tira brusquement de son état contemplatif. Volt le dévisageait, de ses yeux de Motisma au travers de l'écran.
« Quoi ? Tu ne veux pas recommencer comme il y a trois jours, non ? »
Bon dieu, ce scandale au café, il s'en souviendrait. La créature envoya un gif avec une personne qui rigolait, visiblement toujours dans l'hilarité.
« Volt. Je te jure que si tu touches à une seule de ces machines, je trouverais un moyen de te coincer dans ce téléphone, ou pire, dans ta pokéball. »
L'air menaçant du dresseur eut raison du farceur, au prix de quelques curieux qui le dévisageaient, en train de parler à son téléphone flottant. Au point où il en était, il n'était plus à ça près.

Volt, fidèle à lui-même, est à deux doigts d’entrer dans une des grosses enceintes pour prouver à son dresseur qu’il peut. C’est ce qu’il fait ; et devant les yeux ébahis des gens les plus proches, sur le sable, l’engin se met à léviter un peu au-dessus du sol, et Peter écarquille les yeux. Le dresseur se reprend vite ; il se rapproche, fronce les sourcils comme jamais dans sa vite, serre les dents. Il lance des éclairs – ha ! des éclairs ! à un pokémon électrique ! – et lui murmure sur un ton trop menaçant et sérieux.
« Pose. Ça. Maintenant. »
Une expression fantomatique s’affiche un instant, souriante puis grimaçante, et enfin, enfin, le Motisma sort de là, repars dans le téléphone et boude. Bien ! Au moins comme ça, il ne foutra pas le boxon de partout.

Peter soupire, recule, avant de se laisser tomber sur le sable, non loin d’une petite blonde qui a, sans aucun doute, vu toute l’altercation. Leurs regards se croisent un instant, et il sait qu’elle sait, et il n’est pas sûr de comment elle l’a perçu. Si jamais elle l’a pris pour un saboteur…
« … Si on pouvait garder ça entre nous… »
Ce qui est idiot, parce qu’au moins cinquante autres personnes ont dû le voir. Au bas mot. Et bon, ils ne sont pas tous en train de le dévisager, mais il entend certains chuchoter autour, et le malaise monte dans son corps. Il gigote, laisse ses mains se tripoter nerveusement. Ce n’était pas du tout ce à quoi il pensait en venant à un concert ! Il se racle la gorge, maladroitement, cherchant à détourner l’attention et le sujet.

« Je-euh, je-Vous-Vous aimez ce groupe ? »
Eh. Pas mal comme introduction ça, Peter. Si elle ne te trouvait pas déjà bizarre, là c’est sûr tu as remporté le gros lot. Il essaye de ne pas grimacer devant ses propres mots, de garder une expression neutre. Et sa voix monte d’une octave, encore plus embarrassé.
« Moi c’est Peter. »
Et : elle ne t’a pas demandé comment tu t’appelais, idiot ! Elle n’en a probablement rien à cirer ! Cringe. Il baisse ses yeux glacés, fixe un point sur le sable. Il est presque sûr d’entendre le clic caractéristique de l’appareil photo sur son portable, ce qui veut dire qu’il ne pourra plus jamais échapper à ce moment.
Volt a eu sa vengeance, d’une certaine façon.

Danser. Ahaha. Ahahahahahahhaha. Non. Peter ne fait pas ça. En tout cas, pas devant une foule d'inconnue, ses collègues qui se moque un peu de sa difficulté sociale, et surtout pas depuis son accident. Contrairement à ce que la majorité de son groupe de vacanciers pensent, Peter sait faire la fête. En fait, il est même tellement doué pour faire la fête qu'il ne s'arrête généralement plus. Il inspire, expire, et répond à la demoiselle, plus calme.
« Non, pas vraiment. J'espérais une soirée calme à vrai dire ; mais je pense que Kopadia ne connaît pas ce mot. » Il jette un regard par-dessus son épaule, et voit quelques curieux détourner le regard. « Quelques curieux. La plupart ont arrêté. »

Et. Tant mieux, parce qu'il n'avait pas vraiment envie d'être une attraction. Même si Volt en rêvait. A l'introduction de son interlocutrice, le brun l'observe plus attentivement. Un instant, la douceur sucrée qu'elle lui inspire s'associe indiciblement au mot “naïve”, et il lui faut une seconde pour reporter le jugement et se dire que ça ne le regarde pas. La Dinoclier en revanche, elle a l'air de ne pas l'apprécier. Ou à défaut, de faire preuve de plus de méfiance que sa dresseuse. Il se passe machinalement une main dans ses cheveux, puis cligne des yeux en réalisant qu'elle lui a tendu la main. Il s'empresse de la prendre, un peu maladroitement – et continue de s'engueuler mentalement – avant de se racler un peu la gorge, gesticulant vers son téléphone flottant.

« Volt. C'est un Motisma. Disons qu'il aime bien faire de n'importe quel appareil électronique son chez-lui. »
Ledit Motisma ricane, se pose devant la Dinoclier – et Peter plisse les yeux ; est-ce qu'il a choisi un angle avec l'enceinte juste derrière lui ? - et active son flash avant de prendre une photo en plein dans les yeux du pokémon. Peter pourrait hurler. A la place, il attrape le téléphone précipitamment, se retrouve directement face à la soi-disant “je charge” Dinoclier, et inspire.
Ma soirée est déjà assez compliquée comme ça, ne charge pas, ne charge pas, ne charge pas.
Vive la technologie.

Peter expire – pour se calmer, pour se donner du courage – et observe son interlocutrice calmer son pokémon du mieux qu'elle peut, dans ces circonstances. Le brun ne dit rien, soulagé d'une part de ne pas avoir reçu un Dinoclier en plein dans la tronche – ça aurait sûrement été un drame – et d'autre part que la tentative de Volt de saboter sa vie ait échoué. La calamité sur pattes – ou sur courant ? – semble mécontente de l'issue, mais n'en pipe pas mot. Peter se redresse, lance un regard d'excuse à Krysta et entend derrière lui que tout se met en place pour le début de concert. Su-per.

L'enthousiasme du brun ne pourrait pas être plus bas ; son pokémon désastre ne fait que le mettre de mauvaise humeur et ses farces à répétition commence à avoir raison de sa patience. Il observe le pokémon fossile – pourtant bien vivant – dans les bras de la demoiselle, qui essaye de le calmer comme elle peut. Peter ne sait pas vraiment comment il peut aider ; malheureusement, pour les yeux de la bestiole, à part attendre un moment... Les dégâts devraient être inexistants également ; c'est juste un peu inconfortable.

« Ca ne devrait pas durer plus d'une ou deux minutes. Il ne faut juste pas réessayer trop tôt, laisser le temps à ses yeux de se réhabituer. »

Peter sait peu de choses sur la vitesse à laquelle s'habitude les yeux à un changement de luminosité, mais il sait que l'un des moyens les plus fiables est de fermer les yeux – ce qui est chose faites. Une personne dans le noir qui ferme les yeux quand on allume la lumière n'aura pas de temps d'adaptation au changement de luminosité. Il n'est pas très sûr du pourquoi derrière ça, mais c'est une astuce qu'il utilise souvent.

Derrière eux, insouciants de la catastrophe qui a eu lieu, la scène semble commencer à s'animer. Le concert ne devrait pas tarder à commencer, pour son plus grand soulagement. Le fléau dans son téléphone est tombé silencieux ; il est apparent que ses tentatives ne mèneront nul part et qu'il est coincé ici pour le temps du concert. Finalement en paix pour une durée indéterminée, le brun peut enfin se concentrer sur ce qui passe devant lui.

« Je suis désolé. Volt n'est pas très content d'être ici ; il est un peu caractériel. Maintenant que ça va bientôt commencer, il devrait se calmer un peu. »

Il espère ne pas avoir trop fait fuir son interlocutrice, mais il ne lui en voudra pas non plus si elle décide de s'éloigner du fauteur de trouble pour profiter de la musique.