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Très chère Irisis,
J'ai reçu votre missive. Vous m'en voyez clairement navrée, mais pas surprise. Adamante Wrigley est un adolescent perturbé, bien qu'il n'ait pas mauvais fond malgré les apparences.
La sentence est juste, et j'ose espérer qu'un jour, il acceptera une discussion pour en renverser le cours. Je n'irai pas jusqu'à vous dire qu'il s'excusera, ça ne semble pas dans sa nature.
Vous avez agi au mieux pour protéger ce qui vous a été légué et ne pas vous mettre davantage à dos votre peuple.
Personne ne peut vous juger sur les actions prises. Ne soyez pas dure envers vous-même, nous devons tous essuyer des échecs. Je serais ravie de m'entretenir avec vous avant la tenue du Solem. Vous pouvez compter sur mon avance.

Le temps s'était écoulé depuis cette lettre. Les catastrophes avaient eu l'occasion de s'enchaîner et Adamante d'être envoyé en centre. Sa santé de se noyer dans les angoisses apportés par des adolescents, dont un qu'elle souhaitait adopter. Qu'elle ne pourrait jamais abandonner. Tous de Calléis considéraient Noah comme l'enfant de la dirigeante. La question ne se posait pas. Elle ne s'était jamais posée. Dès son arrivée, Alice en avait pris soin. Comme elle aurait fait pour tous, avec une touche en plus. Une présence plus marquée, des gestes plus raides, comme de crainte de ne pas savoir s'y prendre. Ce n'était pas tous les jours qu'un enfant débarquait de la jungle sans aucun souvenir. Sans rien pour le guider. Sans rien pour l'aider.

La brûlure légère à ses poumons était témoin des heures dans le noir à ressasser les derniers événements. De toutes les années à avoir repris le flambeau de son père, les préoccupations avaient été diplomatiques, et luminescentes. Certes, elles avaient parfois affectées sa santé également, mais jamais Alice n'avait eu le sentiment de tenir entre ses mains les fils d'une vie. Qu'un geste de trop, et elle le perdrait. C'était une angoisse nouvelle qui compressait sa cage thoracique. Jamais elle ne pourrait se pardonner de le voir s'éloigner, ne jamais revenir. Elle ne saurait blâmer nulle autre qu'elle-même si quelque chose lui arrivait.
Il avait failli y passer déjà.

Comment dormir la nuit quand on entend à ses tempes les inquiétudes d'un autre ? Quand le coeur se débat en se demandant dans quelles galères encore il pourrait se poser ? Fermer les yeux et sentir son odeur dans sa tente en se disant que cette effluve, elle pourrait bien venir à disparaître. Aucune brochure pour lui expliquer comme gérer un adolescent traumatisé, voilà qu'elle devait en assumer deux. Le désarroi de madame Wrigley résonnait étrangement avec le sien, mais son rôle était de soutenir le peuple de Calléis, pas de se reposer sur lui.

Alors derrière cette stature fière et froide, elle y scellait les insomnies se prolongeant; les sueurs froides et les quintes de toux. Elle y masquait l'effroi jusqu'alors inconnu quand elle ne le voyait pas, cette crainte en revoyant Adamante dans son camp. On ne changeait qu'au moment où on comprenait devoir changer. Est-ce que ce cours séjour avait suffit ? Alice en doutait.

L'aile de Dichotomie la frôla et elle souffla, remerciant d'une baie sa Bruyverne. Il fallait se préparer. Elle s'était dirigée vers sa trousse de maquillage obtenue à Haptos, avait pris le fond de teint pour le fondre doucement sur sa peau. Les nuits volées devaient demeurer son secret. Alors elle prenait le temps de se préparer, artifices pour masquer la réalité. Doucement, arranger ses cheveux et s'habiller. Bleu marin. Pour l'occasion, les couleurs sombres étaient de mises, mais le noir allait aux enterrements.

Et quand elle fut enfin prête, elle fit signe à Dichotomie qui l'aida à se diriger vers la tente de Noah, pour qu'elle puisse y entrer doucement. Elle réveilla gentiment Noah pour lui indiquer que c'était l'heure de se lever, lui donna une heure maximum pour se préparer, parce qu'Alice devait être présente suffisamment en avance pour offrir du temps à Irisis. Une conversation devait avoir lieu. Le trajet se fit dans le silence, sans doute tous deux n'étaient pas assez éveillés pour parler. Alice, au final, gardait son peu d'énergie pour le Solem. Elle devrait contacter Dr. Thorns bientôt, une visite était de mise. La santé précaire tournait vers le bas, elle ne pouvait se le permettre. Qui sait ce qui attendait Lentis prochainement ? Elle avait reporté ses derniers rendez-vous, elle ne pouvait plus les délayer.  

Lorsque le téléporteur les laissa à Anthos, elle se dirigea vers l'emplacement convenu. Il ne restait qu'à attendre Irisis,