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Ce jour ensoleillé est propice à s’aérer. Mes petits monstres et moi avons besoin de nous détendre. Ces derniers temps ont été mouvementés. Le mariage entre nos entraînements et le travail a laissé peu de place au repos. C’est pourquoi, je les amène à la plage sur l’île de Kopadia. Tous sont heureux de cette initiative. L’équipe R2F profite de ce jour pour prendre un congé ; eux aussi ont besoin de se relaxer. Treize pokémons à surveiller c’est déjà bien suffisant et au vu de leur taille, ça n’aurait pas été aisé de garder un œil sur eux. Si je n’en ai pas la casquette, je suis pourtant bel et bien animateur de centre aujourd’hui. Heureusement, je connais mon groupe. Certains d’entre eux sont sages et n’ont pas besoin d’être surveillés. Les autres cependant…

Voici le tableau. Hormis mes rongeurs électriques, tous mes pokémons sont présents. Kinstone, Mondame et Pohmpote, allongés sur le sable, profitent de la chaleur du soleil et de ses rayons. Becky, Hernium et Tea’Gik se dispersent sur la zone de jeu. Ils anticipent les menaces potentielles et s’assurent qu’aucun de leurs compagnons ne se mettent en danger. Oshi, ma petite loupiotte guirlande, attire par tous les moyens mon attention en faisant des bonds dans l’eau. Riri, Nibura et Fange OFF surfent sur les vagues. Et enfin Voltara s’amuse avec Pobsou qui a du mal à rester debout sur le sable. Petit dernier de la bande, Keunotor, à qui je n’ai pas donné de surnom encore sort de sa pokéball. Naturellement le castor va pour rejoindre l’eau, son élément de prédilection. Ce moment est assez génial. Il n’y a rien qui puisse me mettre en alerte et mes pokémons témoignent d’une belle cohésion. Ils m’offrent ainsi quelques minutes de répit. Assis sur le sable, les genoux pliés, mes bras enveloppant mes jambes, ma tête réfugiée dans le creux de mon corps, je surveille de près l’intégration de Keunotor dans la bande. Je me sens méfiant malgré le calme apparent. La réaction de…

« Nibura ! » Je me relève précipitamment et accours jusqu’à faire monter le niveau de l’eau à mes cuisses. Je m’interpose rapidement entre Nibura et Keunotor. « Ce comportement est inacceptable ! » J’aborde Nibura avec franchise, sans détour. Mon visage exprime la sévérité, celle d’un parent en colère et surtout… « Je suis déçu par ton attitude. » Je l’ai examiné au loin, rôdant comme un prédateur autour de sa proie. Nibura a tenté d’attaquer Keunotor et d’en faire son repas. Je ne l'explique pas. Nibura ne s'attaque pas aux autres pokémons de l'équipe. Cet incident aurait pu être évité si j’avais été plus prudent en accompagnant Keunotor avec proximité. Mais cette éducation là me pose problème sur deux points. La première car j'estime que Keunotor doit trouver sa place au sein du groupe indépendamment de moi. La seconde car je refuse de traiter Nibura différemment des autres. J’ai conscience qu’il est agressif mais lui aussi a le droit à une autre chance, celle d'être différent. Je n’ai pas le temps pour y penser plus longtemps. « Rentre dans ta pokéball. » Cet ordre s’applique aussitôt et le pokémon disparaît. Le danger n'est plus là et j'espère que cela n'a pas alourdi ce pauvre Keunotor d'un traumatisme. Je me retourne alors pour lui en parler et constate son absence...  « Keunotor ? »

Le choc qui oppose la température de l’eau à celle de mon corps n’a aucune incidence sur moi. Depuis mes dix-huit, je m’entraîne à agir dans l’environnement sans être handicapé par les conditions. Mon corps a développé une forme d’immunité. Je sens le froid qui me plaque mais je ne le ressens pas et il ne provoque aucun effet sur mon corps. « Fange OFF, Oshi, Riri, cherchez-le dans l’eau. » Je lutte contre la force de la mer pour atteindre le sable. Je porte des chaussures d’eau me permettant de ne pas être en contact direct avec le sol. Naviguant avec et contre les courants des vagues, mes bras s’élancent pour me donner de l’élan. « Keunotor a disparu. Pobsou, Mondame, avec moi ! Becky, Pohmpote et Dolman à l’Ouest. Tea’Gik, Hernium et Voltara à l’Est ! » J’avais pensé chacune des trois équipes.

Pobsou gagne mes bras et Mondame marche à mes côtés. Je rejoins un chalet en hauteur de plage pour couvrir le plus large des périmètres. En entrant, plusieurs personnes sont présentes. Hommes, femmes, adultes, enfants… Il n’y a pas un profil type. Puis, je remarque tout de suite une bannière en toile rose suspendue fêtant un évènement sur laquelle il est écrit : « Journée de l’échange ». J’ai des doutes sur le fait que Keunotor se soit réfugié ici. Cependant, par peur, ce n’est pas impossible qu’il se soit caché dans le premier bâtiment sur son chemin.

Bingo ! Je le vois marcher derrière une jeune femme aux longs cheveux d’or. Cette dernière ne semble pas avoir remarqué sa présence et s’adresse à d’autres personnes alors que Keunotor s’assoit. Personne ne remarque la scène et ceux qui jettent un œil à Keunotor pensent probablement qu’il appartient à cette femme. C’est maintenant que le vrai challenge commence pour moi. Récupérer Keunotor sans attirer l’attention sur moi. Je ne peux donc pas crier. Et si je m’approche de lui, je prends le risque de lui faire peur à nouveau. Alors je contourne la pièce pour me placer dans son champ de vision. Je n’ai plus qu’à faire preuve de patience et… C’est bon ! Il me voit ! Je lui fais un signe de main, lui demandant de me rejoindre. Il ne bouge pas. J’insiste, mon mouvement se fait plus pressé et plus autoritaire, ma main inflige un courant d’air dont l’intensité s’apparenterait à l’attaque Lame d’Air pour une fourmi.

Mais ce qui se passe ensuite est… Ennuyeux. C’est la Dame qui s’approche de moi. Et c’est peu étonnant puisque mes indications l’invitaient clairement à me rejoindre. Sauf que mes messages ne lui étaient pas destinés… Et alors qu’elle s’approche de moi, je sens mon cœur battre intensément, de plus en plus, mes yeux fuient son regard et mon corps se raidit. Ma gorge se noue. Que vais-je lui dire ?!?

Elle s’approche de moi. Elle est près. Très près. Trop près. Elle est aussi près qu’une personne tenant une conversation cordiale avec un inconnu. Le problème n’est donc pas la distance mais que nous soyons des inconnus. « Navré Madame Krysta. » Je m’incline devant elle, signe de respect et témoignage corporel d’une réelle excuse. Je profite d’être penché pour saisir Keunotor dans les bras et le présenter à Dame Krysta. « Je faisais signe à Keunotor de me rejoindre. » Keunotor n’a pas été coopératif et j’ai insisté, créant une situation de quiproquo.

L’éducation de mes parents coule dans mes veines. Il m’est impossible de ne pas répondre clairement à une question. Lorsque cette étrangère s’adresse à moi, ce n’est pas pour que je lui explique mon attitude mais car elle me propose un échange. « Je ne suis pas ici pour les échanges. » Dis-je embarrassé d’être pourtant dans un lieu prévu à cet effet. Je n’imagine pas me séparer d’un de mes pokémons. Chacun d’entre eux a une place particulière dans mon cœur. Pourtant, accepter de se séparer c’est aussi une part de l’amour. Si l’un d’eux me le fait comprendre, c’est son droit de vivre sa vie indépendamment de moi. Alors, je pense à Keunotor qui ne se sent pas en sécurité. « Mais je ne suis pas désintéressé. » Dis-je comme une information essentielle. Ma capacité à analyser une situation s’enclenche. Des Pokémons qui réclame de l’attention… Je connais. Oshi qui se met sans arrêt devant toi, Mondame qui minaude pour te séduire, Pobsou qui se met en danger constamment, Nibura dont l’agressivité a besoin d’être cadré, Bert qui court partout dans la maison et que j'esquive pour ne pas la piétiner.

Je ne peux cependant pas m’engager clairement. J'ai besoin que ce projet se travaille et s’expérimente. « Accepteriez vous de m’accompagner sur la plage avec vos pokémons ? J’aimerais tenter de voir comment Marill se comporte avec mes autres pokémons. » Entre eux et ceux de Dame Krysta, la plage se transformera en une colonie de vacances.

Un pokémon têtu. Mon foyer déborde de pokémons au caractère affirmé. Chaque jour est un défi à relever. Je joue le rôle d’un père et aussi celui d’un éducateur devant prendre soin de sa tribu. Le bruit tourne constamment dans la maison, c’est mouvementé. Alors je ne m’inquiète pas à ce sujet. Dame Krysta accepte ma proposition, elle est ses pokémons se joignent à moi et nous gagnons la plage de Kopadia. Sur le sable, je sors un sifflet particulier et souffle dedans. Après, quelques secondes, mes pokémons nous rejoignent. Ce sifflet est une technologie d'Anthos. Mes pokémons reconnaissent le son et en fonction de l'intensité et du nombre de sifflements, ils reconnaissent l'ordre. Cette apprentissage a demandé des mois d'entraînements. « Nous avons retrouvé Keunotor, il va bien. Merci pour votre aide. Je vous présente Madame Krysta et ses pokémons. » Mes petits monstres s’exclament. Ils sont heureux de rencontrer du monde et ils n’hésitent pas une seule seconde à se rapprocher des autres pokémons. « Pohmpote, pas de bagarre. » Mon intonation est de suite plus sévère sans être méchante. Puis, je sors une pokéball que je dirige vers la mer. « Nibura, je t’autorise à revenir. »

Le piranha navigue dans l’eau sans que je ne puisse anticiper sa trajectoire ni ses intentions. Nibura en a après Keunotor, mais pourquoi. Je n’ai pas le temps de réfléchir, il suffit de quelques secondes pour que le poisson carnivore se propulse de la mer et essaye d’atteindre le Keunotor, toujours dans mes bras. Par instinct, je place l’un de mes bras devant le Keunotor au risque de me faire croquer. « N… » Je n’ai pas le temps de terminer que la Marill bondit du sable pour atterrir sur Nibura et le coincer sur le sable. Elle a utilisé l'attaque Rebond. Puis elle utilise l’attaque Sabotage pour le remettre dans l’eau. Cela devrait calmer Nibura pour un moment.

Je ne peux que me rendre à l’évidence. Si Keunotor reste avec moi, il sera constamment en danger. Impossible de me séparer de Nibura. C’est encore un bébé, il a besoin de moi. Je pose Keunotor sur le sable et je plie les jambes afin de m’adresser à lui. « Tu es libre, tu l’as toujours été. Souhaites tu rejoindre Dame Krysta ? » Le Pokémon regarde la dresseur et accourt dans sa direction. Son choix est fait. « Qu’en est-il de toi Marill ?»

Je ne suis pas prêt. Mon cœur panique, mon esprit est si confus. Pourquoi. Pourquoi s’intéresser à moi ? Je détourne le regard, je ne peux pas être dans ce type d’échange, si direct, si intime. Et je n’ai jamais remarqué que j’avais plus de pokémon de type électrique. Et dire que la team des R2F n’est pas là, que penserait-elle sinon… Je sais que je n’ai aucun pokémon poison en raison de mes phobies. Et lorsque Dame Krysta me pose cette question, c’est comme si elle souhaite en savoir plus sur moi. Je ne ressens aucune mauvaise intention de sa part, elle semble douce et délicate, mais cela n’est pas suffisant pour être à l’aise. Ne sachant pas quoi lui dire, totalement pris au dépourvu, je bégaye quelques sons mais je dois dire quelque chose pour ne pas paraître idiot… Dis quelques chose Nao ! Vite ! « Le coup de foudre. » … Dans ma tête, cela paraissait si logique. Electrique, éclair, tonnerre, foudre. Mais cela n’a aucun sens. Je n’ai pas plus d’amour pour les pokémons électriques que les autres. Peut-être qu’eux sont plus attirés par moi… J’aime les pokémon peu importe leur type. Je suis totalement désemparé, mes yeux se troublent et cherchent un appui. J’ai parlé d’un coup de foudre à une inconnue. J’avais simplement le souhait de lui dire que… Je ne sais pas… Je veux disparaitre. Je n’ai pas ressenti cette gêne depuis Mondame à Adamantia.

Heureusement que les pokémons sont là pour animer la suite. Les évènements si brusques, espérons qu’ils fassent oublier à Dame Krysta ma réponse. Espérons qu’elle ne revienne pas dessus. Espérons qu’elle aussi soit gênée de ma réponse au point de ne plus me poser aucune question. Et ce lien avec les pokémons me permet rapidement de retrouver mon aisance et mon sang-froid. Je peux de nouveau communiquer de façon adaptée. Keunotor fait son choix. Quant à Marill, elle chevauche Kinstone. Ce dernier est du genre patient et gentil. Une véritable crème comme j’ai déjà entendu le dire par une plus jeune génération. Maintenant que tout est en place et que les pokémons jouent ensemble et font connaissance, qu’en est-il de nous humains ? « Je… » Ne sais pas quoi lui dire. « Vous… » Habitez ici ? Êtes une femme ? Aimez les pokémons aussi ? Que quelqu’un m’aide par pitié…

Et c’est Mondame qui intervient. Merci. Elle se met devant Dame Krysta, les yeux émerveillés. Elle minaude, comme à son habitude. Dès qu’elle croise une personne, un être, Mondame tombe amoureuse et veut séduire. Elle est tout l’opposé de moi. Et d’habitude, je suis un peu embêté par ce comportement mais cette fois-ci non, elle attire l’attention sur elle et Dame Krysta ne s’occupe plus de moi.